Si il y a une divinité qui symbolise bien la dévotion, c’est Hanuman, le Dieu singe, adoré partout en Inde. Avec Ganesh, c’est le dieu zoomorphe le plus aimé et le plus célébré. Rappelons que la dévotion envers une divinité nous permet de reconnaître ses qualités et vertus, et de les faire grandir en nous-mêmes. Certains archétypes comme Hanuman sont ainsi le reflet d’une vie menée avec loyauté, courage et confiance. Autant d’éléments parfois un peu conceptuels, qui, ramenés dans ce personnage, et les épopées le concernant, nous rappellent de continuer notre chemin avec cette force et cette intégrité.
Fils de Vayu, le Dieu du Vent, Hanuman a le pouvoir de voler et la puissance d’un ouragan. Il peut aussi se métamorphoser à volonté, devenir infiniment grand ou petit. Ses origines nous racontent que enfant, il vola, et sauta dans le ciel pour attraper une grosse orange qui brillait. En réalité, il s’agissait de Surya, le Soleil. Une fois capturé et englouti, la disparition du Soleil laissa place à un grand froid et des ténèbres s’installèrent, retirant progressivement la vie sur Terre. Les Dieux s’accordèrent pour demander à Vayu que son fils libère Surya, c’était vital pour le bien des êtres vivants. Mais tardant à le faire, Indra, Dieu des Cieux, lança la foudre sur la mâchoire de Hanuman, permettant à Surya de s’échapper et de briller à nouveau dans le ciel. D’ailleurs, Hanuman en sanskrit veut dire « mâchoire cassée ». On dit que pour se faire pardonner, il honora tous les matins l’astre divin à son lever, en se prosternant devant lui, dans une forme de danse yogique nommée Surya Namaskar, la fameuse Salutation au Soleil… Ceci nous montre que même si nos agissements, à certains moments de notre vie, ne sont pas très « dharmiques », nous avons le pouvoir de nous relever, de la résilience, et de faire le bien. La loi du Karma ne nous en tiendra pas rigueur si elle reconnaît en nous le désir de bien faire.
Indra donnera même des bénédictions à Hanuman pour sa conduite: – Agni, le Feu, le potentiel d’action et de transformation – Brahma, le pouvoir de se mouvoir sans limites – Vishnu, être le plus fort – Varuna, être plus fort que l’eau
Ainsi, Hanuman est le symbole de la force physique, de l’Action, alliée à la Bhakti, la dévotion. C’est dans l’épopée mythique du Ramayana (4e s Av JC) que ces qualités vont se développer. Il y occupe une place centrale, en héros loyal, fidèle et courageux, à la tête de l’Armée des singes, il démontrera l’étendue de son dévouement envers ses Amis, le prince Rama et la princesse Sita.
Au début de cette histoire, Sugriva, le Roi des Singes, est chassé du Trône par les démons. Lui et ses proches vont se réfugier dans les montagnes. C’est là où Hanuman rencontre le prince Rama et son frère Lakshmana, qui lui proposent de venir en aide à l’armée des singes pour que Sugriva regagne son trône et rétablisse le Dharma, l’ordre cosmique universel. En remerciement, Hanuman va aider Rama à sauver la princesse Sita, sa promise, enlevée par un féroce Asura (démon) nommé Ravana, et détenue dans son harem au Sri Lanka.
Nous voyons souvent dans l’iconographie cette image de Hanuman, un genou à terre au sud de la péninsule indienne, scrutant l’océan le séparant de Lanka. Il s’apprête à rassembler son courage, sa force, sa foi et sa confiance pour faire « le grand saut », le pas de géant qui va lui permettre d’atteindre son objectif. C’est pourquoi au Yoga, ce mouvement du corps, le grand écart, est appelée « Hanumanasana ». C’est une posture difficile, qui nous invite à chercher au plus profond de nous les ressources pour réussir ce qui nous semble à priori insurmontable. Nous avons tous une force insoupçonnée qui nous permet d’accomplir des choses incroyables!
Pratiquer avec les qualités de Hanuman est une alliance d’action, de courage, et de dévotion et dépassement de soi grâce à l’humilité et la confiance.
L’histoire est longue et la raconter dans ses détails serait trop long (il faut lire le Ramayana!), mais il est intéressant de noter quelques obstacles symboliques sur le chemin de Hanuman… des freins que nous rencontrons concrètement dans notre vie, et qui nous ralentissent dans notre propre évolution.
D’abord, pendant qu’il franchit l’océan, la montagne MYNAGA lui propose le repos avant de repartir. Il l’ignore et continue vers Lanka. La Montagne, le repos, représentent des excuses que nous nous donnons et qui nous détournent de notre but. Ensuite, le serpent aquatique SURASA lui dit : » Je dois te manger car tu es passé au-dessus de mon territoire ». Hanuman essaie à la fois d’accéder à sa requête, et de poursuivre son objectif de libération de Sita. Il grandit, puis rétrécit (n’oubliez pas sa faculté de devenir infiniment grand et petit), entre ainsi dans la gueule ouverte du serpent et en ressort aussitôt. Symboliquement, être infiniment grand, c’est aller au-delà des situations et des problèmes, endosser son rôle et ses responsabilités, et être infiniment petit, c’est faire montre d’humilité, et de capacité à s’abandonner à la volonté divine. L’image de la montagne qu’il tient dans sa main pendant la traversée est elle aussi riche de symboles. Pendant le combat qu’il mène avec Rama pour battre les démons, Lakshmana, le frère du prince est blessé. Selon le médecin ayurvédique, seule une herbe des sommets de l’Himalaya pourra le guérir. Qu’à cela ne tienne! Hanuman le courageux y vole mais arrivé sur les lieux, il se rend compte que parmi la multitude de plantes, il ne sait quelle est la bonne. Point de doutes! Il se saisit de la montagne entière pour être sûr de ramener à bon port l’essence recherchée. Ceci nous montre que nos doutes sont normaux sur le chemin de l’éveil et de la libération. Ils ne doivent pas nous empêcher d’avancer.
Une fois arrivé à Lanka, Hanuman négocie avec Ravana le terrible démon. Se faisant, il prend une posture plus haute, assis sur son immense queue enroulée. Contrarié, le démon ordonne de brûler la queue de Hanuman, qui, en s’envolant, met le feu au palais, symboliquement, ce sont les Samskaras, les images du Karma négatif qui se transforment en fumée. Le champs est libre pour le prince Rama, qui vient délivrer la princesse.
A la fin du Ramayana, Hanuman apprend au vieux Roi des Singes, qu’il désire rester auprès de Sita et Rama pour les servir. Sugriva lui demande une preuve de son attachement et de sa dévotion. Hanuman ouvre alors sa poitrine, et sur son coeur figurent les visages du prince et de la princesse. Cette représentation est fréquente dans l’imagerie indienne.
Hanuman est la vaillance, la fantaisie. Sa dévotion déplacerait des montagnes. Il réunit toutes les qualités du coeur, qui font de lui un des Dieux les plus populaires de l’Hindouisme. Le célébrer, c’est chercher à faire grandir ces qualités en nous.
Jay Hanuman, Jay Sita Ram
Sources : Yoga et Vedas, Maîtri / Dieux et Déesses de l’Inde, S. Guillerme
La balade d'Elodie B. 